Extrait Petit Manuel des Troubles d'origine Médicamenteuse - 3e Édition
Vous observez un trouble chez un patient ? Et si c'était le médicament ?
Petit manuel des Troubles d’Origine
Médicamenteuse
3 e édition
Introduction
Introduction Utilisés à bon escient, en tenant compte de la situation clinique de chaque patient, certains médicaments apportent un soulage- ment, aident à guérir, ou préviennent l’apparition de problèmes de santé. Quelques médicaments ont contribué à des progrès thérapeutiques importants. Mais les effets des médicaments ne se limitent pas à l’action thérapeutique escomptée. Ces effets sont souvent multiples, certains désirés et d’autres non. Les effets indésirables altèrent la qualité de vie des patients, multiplient et prolongent les séjours à l’hôpital et, parfois, font mourir. Ignorer l’origine médicamenteuse d’un trouble affectant un patient retarde la mise en œuvre de mesures de réduction de l’effet ou l’arrêt de l’exposition au médicament en cause, et expose à une escalade d’examens complémentaires, voire à des traitements eux-mêmes causes d’autres effets indésirables. Penser d’emblée au médicament comme une des causes possibles des troubles qui affectent un patient est une étape indispensable des soins de qualité. Ce Petit manuel des Troubles d’Origine Médica- menteuse a été conçu pour faciliter cette étape de la démarche diagnostique, tout en la resituant brièvement dans le contexte général du trouble. De très nombreux troubles, si ce n’est tous, peuvent avoir une origine médicamenteuse. Certains troubles banals tels que nausées, diarrhées, urticaires, céphalées, sensations vertigineuses font mettre en cause de très nombreux médicaments. Nous ne les avons pas tous inclus dans ce manuel. Sans viser l’exhaustivité, nous avons abordé un grand nombre de troubles, rangés par grands domaines médicaux, et présenté une liste des principaux médicaments connus pour les causer ou les aggraver. Par exemple, les causes médicamenteuses à évoquer devant un angor, en section 1.2 ; devant une cataracte, en section 10.1 ; devant un hoquet, en section 5.5 ; devant une thrombose veineuse profonde, en sec- tion 1.3 ; durant les premières heures d’un syndrome de Lyell, en section 2.3. Le lien de causalité entre un médicament et un trouble est parfois direct, résultant de l’action pharmacologique. Par exemple, dans la section “Convulsions” (section 8.1), figure la liste des médica- ments qui provoquent des convulsions par abaissement du seuil de convulsion. Mais certains effets indésirables résultent d’une action indirecte du médicament. Ainsi, une convulsion est parfois une manifestation d’une hyponatrémie, causée par un médicament hyponatrémiant sans effet direct sur le seuil de convulsion. La section “Convulsions” ne cite pas ces médicaments, mais renvoie vers la section “Hyponatrémie” (section 4.4).
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1
Introduction
Chaque section, généralement structurée en trois parties, resitue en quelques mots le contexte clinique, rappelle les principaux facteurs de survenue autres que médicamenteux, et liste les prin- cipaux médicaments en cause. En fin d’ouvrage, un index basé sur une large base de mots-clés variés aide à naviguer rapidement. L’analyse des principaux troubles d’origine médicamenteuse et des médicaments en cause se poursuit. Les résultats sont publiés mois après mois dans Prescrire et aussi dans l’espace “Interactions Médicamenteuses” de l’Application Prescrire. Nous espérons que ce Petit manuel des Troubles d’Origine Médicamenteuse vous aidera à répondre dans de nombreuses situations cliniques à une question simple et qui change parfois la vie des patients : « Et si c’était le médicament ? ». ©Prescrire
« Une prise en charge médicale ou pharmaceutique sans véritable accompagnement personnalisé comporte le risque d’enlever au patient l’appui des ressources intrinsèques de son intellectualité, de sa spiritualité, de sa philosophie des choses de la vie. Et ce risque peut aussi affecter “les petits”, les “obscurs”, les “sans-grade” soumis aux chocs ondoyants de la médecine technique qui ébrèchent et mutilent les plus sensibles. »
Paul Montastruc
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2
Sommaire
Introduction
1 6
Repères
Une démarche active pour limiter la survenue de troubles d’origine médicamenteuse
9
Sources documentaires
12
1
TROUBLES CARDIOVASCULAIRES
Insuffisances cardiaques
1.1 1.2 1.3 1.4 1.5 1.6 1.7 1.8 1.9
13 18 23 27 30 32 34 37 41 43 44 47 49 51 53 57 59 62 63 65 66 69 71 74 76 77 80 81 82 85 87 89 90
Angors
Thromboses et embolies
Torsades de pointes
Bradycardies
Fibrillations auriculaires Hypotensions artérielles Hypertensions artérielles
Hypertensions artérielles pulmonaires
1.10 Valvulopathies
1.11 Troubles de la conduction intracardiaque
1.12 Hyperlipidémies
2
TROUBLES CUTANÉS Photosensibilisations
2.1 2.2 2.3 2.4 2.5 2.6 2.7 2.8 2.9 3.1 3.2 3.3 3.4 3.5 4.1 4.2 4.3 4.4 4.5 4.6 4.7 3 4
Altérations de la cicatrisation
Syndromes de Lyell et de Stevens-Johnson
Éruptions acnéiformes et acnés
Chutes de cheveux Atteintes des ongles
Excès de poils
Érythèmes pigmentés fixes
Psoriasis
TROUBLES ENDOCRINIENS
Hypoglycémies Hyperglycémies Hypothyroïdies Hyperthyroïdies Gynécomasties Hyperuricémies Hyperkaliémies Hypokaliémies Hyponatrémies Hypercalcémies Hypocalcémies
TROUBLES MÉTABOLIQUES
Prises de poids par augmentation de la masse grasse
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3
Sommaire
5
TROUBLES DIGESTIFS Atteintes hépatiques
5.1 5.2 5.3 5.4 5.5 5.6 5.7 5.8 5.9
93 95 98 99
Pancréatites
Ulcérations œsophagiennes
Bézoards Hoquets
101 102 103 105 108
Reflux gastro-œsophagiens
Ulcères gastriques ou duodénaux
Diarrhées
Lithiases biliaires
6
TROUBLES HÉMATOLOGIQUES Neutropénies et agranulocytoses
6.1 6.2 6.3
110 113 116
Anémies
Hémorragies
7
TROUBLES IMMUNOLOGIQUES
Immunodépressions
7.1
120
8
TROUBLES NEUROPSYCHIQUES Abaissements du seuil de convulsion
8.1 8.2 8.3 8.4 8.5 8.6 8.7 8.8 8.9
122 125 128 130 133 134 135 138 138 140 143 145 147 148 151 153 155 157
Neuropathies
Crampes
Rhabdomyolyses
Tics
Syndromes des jambes sans repos Accidents vasculaires cérébraux
Chutes
Troubles extrapyramidaux
8.10 Tremblements
8.11 Dyskinésies tardives 8.12 Neuropathies optiques
9
TROUBLES BUCCODENTAIRES Accroissements des gencives
9.1 9.2 9.3 9.4 9.5 9.6
Troubles du goût
Colorations des dents Sécheresses buccales
Aphtes et ulcérations aphtoïdes buccaux
Caries dentaires
10
TROUBLES OCULAIRES
10.1 Cataractes
159 161 164 165
10.2 Atteintes de la cornée
10.3 Troubles de la vision des couleurs 10.4 Glaucomes chroniques à angle ouvert
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4
Sommaire
10.5 Myopies
166 168
10.6 Troubles de l’accommodation
11 TROUBLES ORL 11.1 Pertes d’audition
170 172
11.2 Atteintes des cordes vocales
12 TROUBLES RESPIRATOIRES 12.1 Pneumopathies interstitielles TROUBLES PSYCHIQUES 13.1 Comportements violents 13
175
179 180 182 184 186 189 191 192
13.2 Cauchemars 13.3 Insomnies
13.4 États dépressifs et suicides
13.5 Troubles psychotiques et hallucinations
13.6 Manifestations d’anxiété
13.7 Somnolences et altérations de la vigilance
13.8 États maniaques
14
TROUBLES OSSEUX ET TENDINEUX
14.1 Ostéoporoses
194 196 197 199
14.2 Atteintes tendineuses
14.3 Syndromes du canal carpien
14.4 Retards de consolidation de fracture
15
TROUBLES UROGÉNITAUX ET RÉNAUX
15.1 Insuffisances rénales 15.2 Rétentions d’urine
201 203 205 207 210 212 214 217 218 219 223 226 228
15.3 Œdèmes par rétention hydrosodée
15.4 Incontinences d’urine 15.5 Lithiases urinaires 15.6 Colorations des urines
15.7 Insuffisances de la fonction érectile
15.8 Érections prolongées du pénis et priapismes
16
RÉACTIONS SYSTÉMIQUES
16.1 Le syndrome atropinique 16.2 Les sympathomimétiques 16.3 Le syndrome sérotoninergique
16.4 Effet dit antabuse
16.5 Déficit en acide folique
Index
230 238
Ours de Prescrire
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5
Troubles osseux et tendineux
14.2
Des médicaments exposent à des atteintes tendineuses
14.2 Des médicaments exposent à des atteintes tendineuses
Contexte. Les atteintes tendineuses se manifestent princi- palement par une douleur locale. Le terme tendinite est couramment employé pour désigner diverses atteintes inflamma- toires ou non du tendon ou des tissus périphériques tels que la gaine. Des douleurs localisées au niveau des tendons sont les premiers signes d’appel des atteintes tendineuses. Elles sont uni- ou bila- térales et surviennent surtout lors de la mise en tension des tendo ns. Elles sont parfois présentes au repos. Tous les tendons sont susceptibles d’être atteints. La douleur s’accompagne parfois d’un œdème, d’un érythème, d’une augmentation de la chaleur locale, de nodules, de faiblesses musculaires, d’une raideur de l’articulation, etc. Parfois, des at- teintes fonctionnelles plus ou moins invalidantes se manifestent par une diminution de l’amplitude des mouvements, ou l’impos- sibilité de réaliser certains gestes en fonction du tendon atteint. Les douleurs des atteintes tendineuses persistent d’autant plus longtemps que les facteurs de survenue ou aggravant les lésions n’ont pas été identifiés puis éliminés. Elles régressent ensuite le plus souvent lentement en quelques semaines à quelques mois. La principale complication est la rupture partielle ou complète du tendon, qui se manifeste souvent par une douleur vive et soudaine. En l’absence de test diagnostique simple, fiable et rapide, il est vraisemblable que certaines atteintes tendineuses ne sont pas reconnues comme telles, mais confondues avec des arthralgies ou d’autres troubles musculosquelettiques mal cernés. Facteurs de survenue. Les causes des atteintes tendineuses sont mal connues. Le plus souvent, plusieurs facteurs sont associés et sont à prendre en compte pour en prévenir l’apparition, surtout : la répétition de certains gestes ou des efforts physiques particuliers dans le cadre d’activités professionnelles ou sportives ; des mouvements extrêmes ou effectués en position inadéquates ; des anomalies de postures ; des lésions préexistantes du tendon ; des médicaments. Étant donnés le nombre et la diversité de ces facteurs, le rôle du médicament est parfois évoqué tardivement, ce qui augmente le risque de séquelles.
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Troubles osseux et tendineux
Des médicaments exposent à des syndromes du canal carpien 14.3
Médicaments qui causent ou aggravent
des atteintes tendineuses Les atteintes tendineuses d’origine médicamenteuse exposent à des séquelles invalidantes qui dépendent de la gravité de la lésion initiale et de la durée d’exposition au médicament. Les mécanismes évoqués à l’origine des atteintes tendineuses d’origine médicamenteuse sont une toxicité directe sur les tendo ns ou des troubles immunoallergiques ou vasculaires (telles que des nécroses tendineuses ischémiques). Peu de médicaments sont connus pour exposer à des atteintes tendineuses. Les médicaments qui exposent à des atteintes tendineuses sont principalement : − les fluoroquinolones y compris en monodose ou par voie auriculaire ; − les statines ; − les corticoïdes quelle que soit la voie d’administration ; − etc. Et aussi : − un inhibiteur de l’aromatase : l’ anastrozole ; − des rétinoïdes : l’ isotrétinoïne , l’ acitrétine , l’ étrétinate ; − un immunodépresseur : le léflunomide ; − un antibiotique : l’ oritavancine ; − etc. L’association de plusieurs médicaments qui exposent à des atteintes tendineuses majore ce risque.
14.3 Des médicaments exposent à des syndromes du canal carpien
Contexte. Un syndrome du canal carpien est un ensemble de troubles sensitifs et parfois moteurs provoqués par la compression du nerf médian au niveau du poignet dans le canal carpien, entre les os et le ligament annulaire du carpe. Le syndrome du canal carpien est fréquent chez les adultes. Un syndrome du canal carpien se manifeste par des douleurs, des fourmillements ou des engourdissements au niveau du territoire sensitif du nerf médian : pouce, index, majeur, côté de l’annulaire faisant face au majeur. Chez certains patients, ces troubles s’étendent à toute la main, ou irradient parfois dans l’avant-bras voire jusqu’à l’épaule.
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Troubles osseux et tendineux
14.3
Des médicaments exposent à des syndromes du canal carpien
Facteurs de survenue. Le syndrome du canal carpien est plus fréquent chez les femmes enceintes, ou ménopausées, chez les personnes obèses, chez des patients atteints de diabète, d’hypo thyroïdie, d’acromégalie ou d’amylose. Un traumatisme de la zone main-poignet, tel qu’une fracture du poignet, des mouvements répétitifs, en force, ou des vibrations de la main et du poignet, exposent à la survenue d’un syndrome du canal carpien. Une neuropathie du nerf médian, une maladie du tissu conjonctif ou des troubles articulaires tels que l’arthrose ou la polyarthrite rhumatoïde sont aussi parfois sources de syndrome du canal carpien. Les mécanismes impliqués sont une compression anato- mique, une inflammation, un épaississement tendineux, un œdème ou un hématome dans le canal carpien, un canal non extensible. Un médicament est parfois en cause. un syndrome du canal carpien Les médicaments qui causent ou aggravent un syndrome du canal carpien sont principalement : − des inhibiteurs de l’aromatase : l’ anastrozole , l’ exémestane et le létrozole ; plus fréquemment que sous tamoxifène , un antiestro gène antagoniste des récepteurs de l’estradiol ; − les diphosphonates ; − les anticoagulants (compression du nerf par un hématome) ; − les inhibiteurs de protéase du HIV et un inhibiteur de l’intégrase du HIV : le raltégravir ; − un immunodépresseur : le tériflunomide ; − les collagénases de Clostridium histolyticum , utilisées dans la maladie de Dupuytren par injection locale susceptible de créer un œdème compressif dans la zone du nerf médian ; − etc. Et aussi : Il existe des doutes pour d’autres médicaments : − les bêtabloquants ; − les contraceptifs hormonaux estroprogestatifs : suspicion basée sur la constatation que la grossesse est un facteur exposant à Médicaments qui causent ou aggravent
un syndrome du canal carpien ; − un antigonadotrope : le danazol ; − les fluoroquinolones ; − l’hormone de croissance ; − l’ interleukine 2 (IL-2) ; − un médicament à effet dit antabuse : le disulfirame ; − etc.
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M édicamenteuse
Utilisés àbonescient, en tenant comptede la situation clinique de chaque patient, certainsmédicaments ont contribué à des progrès thérapeutiques importants. Mais les effets des médicaments ne se limitent pas à l’action thérapeutique escomptée. Ces effets sont souvent multiples, certains désirés, d’autres non. Ce petit manuel permet de retrouver, de manière hiérarchisée, les principaux médicaments connus pour causer ou aggraver divers problèmes de santé, rangés par grands domaines médicaux. À quel médicament penser devant un angor ? une cataracte ? un hoquet ? une thrombose veineuse profonde ? Quel médicament arrêter en urgence devant un syndrome de Lyell ? Etc. Nous espérons que ce Petit manuel des Troubles d’OrigineMédicamenteuse vousaideraà répondredans de nombreuses situations cliniques à une question simple et pourtant d’importance pour le patient : « Et si c’était le médicament ? » Cet ouvrage est conçu et actualisé par la Rédaction de la revue Prescrire , suivant ses méthodes habituelles : écriture collective, vérification de la sélection des données et de leur analyse, contrôles de qualité multiples, etc., détaillées sur www.prescrire.org. À but non lucratif, Prescrire est financée à 100 % par ses abonnés, sans publicité ni subvention ni actionnaire.
Prix : 19,90 € ISBN : 978-2-911517-23-5 ©Prescrire
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