Edition découverte Prescrire 2024-2025

RAYON DES NOUVEAUTÉS

NOUVELLE INDICATION

dapagliflozine ( forxiga °) et insuffisance cardiaque chronique à fraction d’éjection préservée

N’APPORTE RIEN DE NOUVEAU Dans un essai versus placebo chez environ 6 300 patients, après un suivi médian de 28 mois, les hospitalisations pour insuffisance cardiaque ont été moins fréquentes dans le groupe dapa gliflozine (10,5 % versus 13 %), mais avec une exposition aux effets indésirables parfois graves des gliflozines ; et sans efficacité démontrée sur la mortalité. L’insuffisance cardiaque chronique est une affection grave et fréquente, liée à l’incapacité du cœur à assurer un débit sanguin adapté aux besoins de l’organisme. En fonction de la valeur de la fraction d’éjection ventri culaire gauche mesurée à l’échographie cardiaque, une insuffisance cardiaque est dite à fraction d’éjection réduite (inférieure à 40 %) ou préservée (supérieure à 50 %). Les patients avec une fraction d’éjection dite intermédiaire (comprise entre 40 % et 50 %) sont sou vent considérés, notamment dans les essais cliniques, comme ayant une insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée (1). Les médicaments utilisés chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préser vée sont en général ceux proposés en cas de fraction d’éjection réduite, principalement : un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou un antagoniste de l’angiotensine II (alias sartan) ; et un bêtabloquant. Toutefois, début 2024, en cas d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée, aucun de ces médi caments n’a d’efficacité démontrée pour allonger la durée de vie (1,2). Dans l’insuffisance cardiaque, la dapagliflozine , un inhibiteur du co-transporteur rénal de sodium-glucose de type 2 (alias SGLT2), a d’abord été autorisée dans l’Union européenne chez les patients ayant une fraction d’éjection réduite. Dans cette situation, dans un essai randomisé versus placebo chez environ 4 700 patients avec des symptômes malgré un traitement dit opti misé, après un suivi médian de 18 mois, la dapagli flozine a réduit la fréquence d’un critère combinant la mort cardiovasculaire ou certaines aggravations de l’insuffisance cardiaque (16 % versus 21 %). Elle a semblé réduire aussi la mortalité toutes causes confon dues (11,5 % versus 14 %) (1,2). La dapagliflozine est devenue autorisée chez les patients atteints d’insuffisance cardiaque à fraction d’éjection préservée (2,3). Cette autorisation repose sur un essai randomisé, en double aveugle, versus placebo, chez 6 263 patients (âge médian de 72 ans), atteints d’insuffisance car diaque chronique symptomatique malgré un traite ment. Ils avaient une fraction d’éjection supérieure à 40 % (54 % en moyenne, avec environ 34 % des patients ayant une fraction comprise entre 40 % et 50 %). Les trois quarts des patients avaient une limi

tation modeste de leur activité physique sans gêne au repos (stade II de la classification fonctionnelle de la NewYork Heart Association). Les autres avaient une limitation plus marquée à l’effort (stade III). À l’inclusion, le traitement de l’insuffisance cardiaque comprenait notamment un IEC ou un sartan chez environ 73 % des patients, et un bêtabloquant chez 83 %. La dapagliflozine ou le placebo ont été ajoutés aux traitements usuels des patients (2,4). Après un suivi médian de 28 mois, la mortalité toutes causes confondues a été d’environ 16 %, sans différence entre les groupes. Le critère principal d’évaluation a été un critère dit combiné, prenant en compte la mort d’origine cardiovasculaire, une hospi talisation pour insuffisance cardiaque ou une consul tation urgente non programmée liée à l’insuffisance cardiaque. Au moins un de ces événements est survenu chez 16 % des patients du groupe dapagli flozine versus 19,5 % de ceux du groupe placebo (p < 0,01). La différence observée est surtout due à une moindre fréquence des hospitalisations pour insuffisance cardiaque dans le groupe dapagliflozine : 10,5 % versus 13 % (p < 0,01) (2,4). Des indicateurs de qualité de vie prenant en compte des symptômes de l’insuffisance cardiaque, évalués après 8 mois de traitement sur une échelle allant de 0 à 100, ont été améliorés dans le groupe dapagliflo zine par rapport au groupe placebo. Mais la différence entre les deux groupes (environ 2,5 points) est de pertinence clinique très incertaine (2,4). La dapagliflozine expose à des effets indésirables parfois graves, dont des infections urinaires et géni tales, des fasciites nécrosantes du périnée (alias gangrènes de Fournier), des hypotensions artérielles, des insuffisances rénales, des acidocétoses et peut être à des fractures et des cancers (1). L’essai décrit ci-dessus n’a pas apporté d’élément modifiant ce profil connu d’effets indésirables.Trois patients du groupe dapagliflozine ont eu une infection génitale ayant conduit à l’arrêt du médicament versus aucun dans le groupe placebo. Il y a eu cinq acido cétoses dans le groupe dapagliflozine versus deux dans le groupe placebo (2). ©Prescrire Recherche documentaire mise à jour le 10 novembre 2023 La firme AstraZeneca, que nous avons interrogée, nous a fourni une documentation administrative et des éléments du conditionnement. 1- Prescrire Rédaction “Empagliflozine (Jardiance°) et insuffisance cardiaque chronique. Deuxième gliflozine en cardiologie, sans avantage démontré” Rev Prescrire 2022 ; 42 (470) : 885-887. 2- EMA - CHMP “Public assessment report for Forxiga/Edistride. EMEA/H/C/xxxx/WS/2299” 15 décembre 2022 : 81 pages. 3- EMA “RCP-Forxiga” 30 mai 2023. 4- Solomon SD et coll. “Dapagliflozin in heart failure with mildly reduced or preserved ejection fraction” N Engl J Med 2022 ; 387 (12) : 1089 1098 + supplementary appendix : 44 pages. Rev Prescrire • Janvier 2024

L a revue P rescrire (É dition découverte ) • S eptembre 2024 • T ome 44 N° 491 bis • P age 5

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